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Un programme tremplin japonais pour les jeunes scientifiques européens : le programme d’été de la JSPS

Publié le 16 September 2024
Le 26 août, la Société japonaise pour la promotion de la science (JSPS) a célébré la fin d'une nouvelle édition de son programme d'été. De jeunes chercheurs et chercheuses d'unités CNRS sélectionnés nous racontent leur expérience.

En partenariat avec la Graduate University for Advanced Studies (SOKENDAI), le JSPS Summer Program offre aux jeunes chercheurs et chercheuses pré- et post-doctoraux d’Europe et d’Amérique du Nord une occasion unique de découvrir la culture japonaise ainsi que son système de recherche. L’objectif principal de ce programme est de catalyser le lancement de la carrière de scientifiques prometteurs en leur permettant de réaliser un projet de recherche sous la supervision de chercheurs hôtes dans une université ou un institut de recherche japonais pendant une période estivale de deux mois. En outre, le JSPS Summer Program bénéficie également du soutien de ses partenaires internationaux pour le recrutement des participants, un rôle que le CNRS assume en tant que chef de file pour la France.

Élargir leurs horizons scientifiques

Pour les 17 candidats français, la fin de cet été a marqué la conclusion d’une expérience immersive au Japon. La cérémonie de clôture du JSPS Summer Program a été l’occasion de se réunir, de faire le bilan des accomplissements des deux derniers mois et, bien entendu, de discuter de leurs projets scientifiques respectifs. Parmi eux, Clément Gibeaux a tenu son rôle de représentant français pour 2024 en exposant ses travaux devant un public composé de jeunes chercheurs, de représentants d’agences et d’institutions de chaque pays partenaire.

Doctorant au sein d’Edytem (Laboratoire Environnements, Dynamiques et Territoires de Montagne, CNRS/Université Savoie Mont-Blanc), Clément a consacré son séjour à l’Université d’Okayama à l’étude de matériaux poreux innovants pour la détection des norovirus dans l’eau. Son projet a impliqué le développement de matériaux capables de capturer le virus entérique humain (HEV) en milieu aquatique, en se concentrant sur la synthèse et la caractérisation de matériaux à base de chitosane et d’oxyde de graphène. « Ce programme a permis de mettre en place des méthodes novatrices dans le laboratoire japonais, méthodes qui seront directement applicables aux futurs projets de recherche franco-japonais actuellement en cours de préparation », a souligné Clément.

De son côté, Diluka Singappuli, doctorante au CELIA (Centre Lasers Intenses et Applications, CNRS/Université de Bordeaux), s’est concentrée sur la fusion par confinement inertiel, un procédé de fusion nucléaire où le combustible est comprimé et chauffé jusqu’à atteindre les conditions nécessaires à la fusion grâce à l’utilisation de forces d’inertie, telles que celles produites par des lasers. Accueillie par l’Institut d’ingénierie laser de l’université d’Osaka, une des plus grandes installations laser au monde, Diluka a eu l’opportunité de travailler dans des conditions expérimentales extrêmes à une échelle internationale. « C’était le lieu idéal pour ma thèse », déclare Diluka. « J’ai pu travailler dans des conditions expérimentales uniques et acquérir une expérience inestimable pour mon parcours scientifique. »

Eva Gril, quant à elle, a été accueillie au Laboratoire de Gestion des Ecosystèmes de l’université d’Hokkaido à Sapporo sur la thématique du microclimat forestier. Fraîchement diplômée d’un doctorat qu’elle a effectué à Edysan (Ecologie et dynamique des systèmes sous influence humaine, CNRS/Université de Picardie Jules Verne), Eva, spécialisée dans l’impact des canopées forestières sur la température locale dans un contexte de changement global, a enrichi son expertise en explorant les particularités écologiques du nord du Japon. « Entre les typhons, les tempêtes, les tremblements de terre et les glissements de terrain, certains écosystèmes sont laissés à nu », explique Eva. « Et les cerfs n’arrangent pas la situation ! La grande population de cerfs à Hokkaido ralentit fortement le processus de régénération des forêts. » Équipée d’un smartphone doté de la technologie Lidar, une méthode de télédétection pour examiner la surface terrestre, Eva a notamment contribué à l’évaluation de l’érosion lors de glissements de terrain. De plus, elle a apporté une perspective nouvelle aux études du laboratoire de Sapporo, en introduisant l’impact du microclimat dans un contexte de recolonisation forestière, un domaine encore inexploré par l’équipe japonaise. « J’étais en quelque sorte une porte-parole du microclimat », sourit Eva.

L’infusion du Japon dans leurs carrières

Bien que le Summer Program ait à peine touché à sa fin, certains participants envisagent déjà un retour au Japon. Clément aspire à revenir à l’Université d’Okayama fin 2025, après la fin de son doctorat, certainement pour une période d’un ou deux ans. Il souhaite poursuivre ses travaux, de nombreux aspects restants encore inexplorés. « Nous avons déjà eu des discussions ouvertes avec mon superviseur japonais concernant la possibilité de continuer notre collaboration et de solliciter une bourse JSPS Short-term ou Standard Program », indique Clément. Selon lui, le programme a renforcé les relations entre l’Université d’Okayama et l’Université Savoie Mont Blanc, ouvrant la voie à de futures collaborations. L’obtention de ces bourses reste toutefois incertaine mais le jeune cherche reste positif. « Ce qui est certain, c’est qu’il y a une forte volonté de poursuivre cette collaboration franco-japonaise ! Seul l’avenir dira si cela se concrétise. »

« C’était une vraie belle opportunité », assure Diluka. Chaleureusement accueillie par l’équipe d’Osaka et ayant noué d’excellentes relations avec l’équipe locale, elle prévoit de revenir au laboratoire en novembre pour poursuivre ses expériences sur la fusion par confinement inertiel. De rencontre en rencontre, elle a été invitée par une autre équipe à revenir au Japon pour se concentrer sur les questions de stabilité de compression sur une nouvelle installation laser. « Je compte aussi soumettre ma candidature au programme JSPS Standard en tant que chercheuse postdoctorale après la fin de mon doctorat », précise Diluka. « Bien sûr, pour la recherche, mais aussi parce que j’adore le Japon ! »

Actuellement à la recherche d’un contrat postdoctoral en Europe, Eva envisage également de retourner au Japon pour des projets de courte durée, potentiellement dans le cadre du JSPS Short-term Program. Sa visite à Hokkaido a été l’occasion de découvrir un nouveau domaine d’étude et de développer un réseau professionnel, avec l’espoir d’établir une coopération à long terme avec le Laboratoire de Gestion des Ecosystèmes. « Je ne m’attendais pas à participer à autant de projets ni à rencontrer autant de personnes. J’ai eu de nombreuses opportunités qui se sont présentées au fil du temps », reconnaît Eva. Elle a, par exemple, été invitée à donner un séminaire sur ses recherches au centre de recherche forestière de Nayoro, ce qui pourrait peut-être déboucher sur une nouvelle collaboration. « Et une réaction en chaîne très positive est que mon chercheur hôte japonais a invité mon directeur de thèse français à présenter ses recherches lors de la prochaine conférence japonaise sur l’écologie à Hokkaido. »

Le JSPS Summer Program n’est ainsi pas qu’un simple séjour d’été dans un laboratoire japonais. Il favorise non seulement l’épanouissement de jeunes scientifiques mais aussi la création de liens durables entre laboratoires internationaux, allant au-delà des projets individuels des étudiants. Le CNRS est ravi de continuer à soutenir cette initiative et de renforcer sa collaboration avec la JSPS pour ce Summer Program.

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